VIDÉO. Difficile de dire ce qu’est un Juif, tant le ressenti de l’identité peut différer des définitions institutionnelles. Explications.
Par Catherine Golliau
Question interdite de jeux télévisés : les définitions possibles sont tellement nombreuses que le gagnant ne pourrait jamais être désigné. C’est en substance ce que nous explique Jean-Christophe Attias, professeur à l’École pratique des hautes études et auteur, entre autres, de Penser le judaïsme (CNRS, 2013), dans cette vidéo qui pose la question qui fâche : qu’est-ce qu’un Juif ? La réponse traditionnelle des rabbins est connue : celui ou celle dont la mère est juive. Sauf conversion (rares, les rabbins y veillent), l’identité juive est donnée dès la naissance. Résultat, même celui qui ne croit pas, qui ne pratique pas, qui ne respecte aucun commandement (mitzsvah), même celui-là est juif. On est donc un Juif, appartenant à la communauté juive, même quand on n’est pas un Juif religieux, soit un « juif », avec un petit « j » (respect de l’orthographe française). Dans Portrait d’un Juif, publié en 1962, le sociologue d’origine tunisienne Albert Memmi donne pourtant une autre réponse. Qu’est-ce qu’un Juif, selon lui ? « Être un problème. » Pour les autres comme pour soi-même, c’est être différent, exclu, opprimé par essence comme le prolétaire, la femme ou le colonisé… « Il existe un malheur d’être juif », assure celui qui, en 2008, déclarait dans une interview au Point Références : « Je suis un Juif de condition, né juif, et connaissant le sort des Juifs. Mais pas un Juif de conviction. Et résolument pas un Juif religieux. » Compliqué ? Un peu, d’autant que, toujours d’après Jean-Christophe Attias, on peut aussi être un Juif « psychologique », à savoir juste « se sentir » juif, sans pouvoir exactement préciser ce que cela peut bien vouloir dire… Être juif, ou l’identité libérée. Pourquoi pas ?