VIDÉO. Une religion de la loi et du rituel ? Les commandements n’excluent ni l’émotion ni l’intériorité, comme l’explique Jean-Christophe Attias.
Par Catherine Golliau
Les chrétiens disent souvent du judaïsme que c’est une religion légaliste, fixée sur l’application stricte et rigide de multiples commandements. Comme nous l’explique dans cette vidéo Jean-Christophe Attias, professeur à l’École pratique des hautes études et auteur, entre autres, de Penser le judaïsme (CNRS, 2013), il est vrai que le croyant juif se voit imposer de nombreux commandements, les mitzvot (mitzvah, au singulier) : 613 exactement, dont 365 sont des commandements négatifs (« tu ne tueras pas », « tu ne convoiteras pas la femme de ton voisin », etc.), et 248 des commandements positifs, comme, pour les plus connues, le respect du jour du shabbat, la circoncision des enfants mâles ou les trois prières quotidiennes.
S’il est d’usage de mettre en vedette le Décalogue, les Dix Commandements, transmis à Moïse sur le Sinaï avec les Tables de la Loi, le judaïsme a, selon lui, toujours hésité à privilégier une mitzvah plutôt qu’une autre, à établir une hiérarchie entre ce qui serait essentiel et ce qui le serait moins. Le croyant doit en effet essayer de tous les respecter, sachant toutefois que tous les fidèles ne sont pas soumis à la même contrainte. Comme le souligne, non sans malice, Jean-Christophe Attias, plus on est considéré dans le judaïsme, plus on doit en faire : les femmes, infériorisées par rapport à l’homme, ont ainsi moins de préceptes à respecter…
Mais le respect des commandements ne signifie pas que le judaïsme soit une religion sans émotion ni spiritualité, bien au contraire. Les mitzvot sont des actes qui concrétisent le rapport du croyant à son Dieu. Précédés ou suivis d’une bénédiction qui les sacralisent, ils sont porteurs de joie et d’intériorité. Ne parle-t-on pas d’ailleurs de « joie de la mitzvah » ? Si l’on en croît les rabbins des temps anciens, les 248 mitzvot positifs correspondraient à autant de parties du corps humain, tandis que les 365 interdits renverraient aux 365 jours de l’année solaire. Le respect du rituel, garantie de l’harmonie du monde… et de l’homme.